Dimanche 4 novembre 2007, j'ai conclu mon 6ème marathon de l'année en beauté... running the ING New York City Marathon

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Ici un reportage photo (Magnum)

Peut-on simplement " raconter " le marathon de New York ? Pas sûr ! C'est assurément quelque chose à vivre plus qu'à lire. D'ailleurs, on peut le vivre comme les 38 000 coureurs qui se sont élancés le 4 novembre dernier, ou comme les DEUX MILLIONS de spectateurs du parcours.

Reportage de la Michigan Runner Television

 

 

 

Pour les coureurs, il y a plusieurs façons d'appréhender ce marathon, mais je pense que ce n'est définitivement pas le marathon à faire pour viser un " best time ". D'abord, les CINQ (!) ponts sont assez pénibles à monter - d'autant que conformément à la démesure propre à ce pays, les ponts dépassent le kilomètre. Il y a de plus de longues lignes droites qui cassent un peu le moral, et les jambes, car que ce soient la First Avenue qu'on remonte sur 6 km vers le Bronx ou plus tard, dans Central Park avant l'arrivé, c'est loin d'être plat !

Reportage Vidéo dans le milieu de la course, ambiance garantie !

 
Autre point délicat pour les performances sportives, l'attente avant le départ : on doit être debout au moins 4h avant le départ (rendez-vous à 5h à la bibliothèque pour ceux qui prennent le bus, départ de la course à 10h10), faire souvent la queue, pour le ferry, pour le bus vers le départ après le ferry… et se ranger dans les sas plus d'une heure avant le coup de canon. Impossible dès lors de s'entraîner, de se dérouiller un peu avant de partir. Pas facile non plus de gérer l'hydratation et l'évacuation subséquente, même s'il y a des toilettes partout.
Mon objectif était donc assez modeste : profiter de l'ambiance de ce " thrilling event ", et - quand même - finir en moins de 3h. C'était mon sixième marathon de l'année. Si je mets de côté le marathon en montagne de Zermatt couru en juillet (un autre sport !), j'avais fait 2h52 à Vienne fin avril, 2h58 deux semaines plus tard (!) à Prague, 2h57 à Helsinki en août et 2h55 dans la Wachau en septembre, cela semblait donc jouable de passer à New York sous les trois heures sans trop se faire mal. Autant le dire tout de suite : l'objectif n'a pas complètement été atteint. 2h57:03, bonne perfe, mais par contre j'en ai bavé ! Je suis parti trop vite mais rien ne dit cependant que je n'en aurai pas bavé autant en partant plus lentement. Il y a vraiment des passages délicats.
Côté ambiance, c'est de la folie. Par où commencer ? Le départ bien sûr, très solennel avec l'hymne, l'avancement progressif des blocs. J'avais la chance d'avoir une entrée pour coureur rapide donc j'étais bien placé mais les adhérents du New York Road Runners étaient devant, tout comme l'élite. Petite déception, j'étais avec le groupe " vert " donc sous le pont Verrazano car il est sur deux niveaux. On arrive rapidement à Brooklyn et là, l'ambiance, c'est du jamais vu ! " Welcome to Brooklyn !", " Allez la France " et " Allez les bleus " car il y avait autour de moi des coureurs avec des maillots français. Les Français constituaient le troisième groupe le plus important avec 2838 coureurs, derrière les Italiens (3245) et les Britanniques (2995).
J'ai été déçu de voir que seuls les km 5, 10, 15 etc. étaient indiqués. J'ia dû caler mes temps sur les miles alors que je prévoyais de partir en 4'00 au kil, ce qui est pratique pour les calculs. Là je visais 6'26 au miles mais je suis parti bien trop vite. 18'48 aux 5km, je passe ensuite les 10 km en 37'45. C'est à peu près à ce moment que j'ai dépassé Lance Armstrong, le cycliste sept fois vainqueur du tour de France (et convaincu de dopage). Il avait déclaré l'an dernier lors de son premier marathon (à New York) " it was the hardest physical thing I've ever done ", ayant fini en 2h59'36. Cette année il a fait le semi en 1h23'41 et a fin en 2h46'43 => Well done Lance, nice negative split ! (deuxième semi plus rapide).
Je reviens où j'en étais, quand j'ai dépassé la star, avec son équipe et le side-cas qui le filmait en continu. J'avais bien la pâche, mais je me grillais un peu. En plus, je faisais un peu le con, pris dans un jeu avec le public. Dans la grande Fourth Avenue de Brooklyn, j'ai levé le bras droit pour mettre la foule en délire, cela marchait tellement bien que les encouragements étaient presque assourdissants. J'ai remercié la foule en me livrant à un exercice de retro-running (course en arrière). J'ai dû faire 60 ou 80 m, c'était sympa mais un peu crevant en fait. déjà cuit

Photo prise par mes soins, avec mon téléphone, pendant la course, vers le km 15

Les " pas drôles ", c'est le surnom des Juifs hassidim de Brooklyn (un livre leur est consacré). Ils sont près de 40 000 dans Williamsburg, tout en noir. Les femmes et les enfants ont un look fifties qui fait un peu peur. Ils sont complètement indifférents à la course, seuls quelques enfants, en grappe, s'assoient sur les trottoirs et regardent en silence. Au km 20, on passait dans le nord de Brooklyn tout près de chez nos amsi Bruno et Muriel chez qui nous étions hébergés. Caroline m'a donné la bouteille d'eau prévue mais à vrai dire ce n'était pas vraiment nécessaire, on ne fait que boire sur ce marathon ! Il y a des ravitos tous les miles à partir des 5 km. A ce moment, peu après le km 20, j'ai senti que quelque chose ne tournait pas rond dans mes intestins. Aïe ! Je ne sais pas trop à quoi c'est dû, peut-être aux pâtes de la veille, mangées avec de la sauce toute faite (nous étions invités) alors que d'habitude je me la prépare pratiquement sans graisse. Peut-être le " low-fat cake " que je m'étais acheté pour attendre le départ, les deux " big coffee " avant le départ, entre 6h et 10h, je ne sais pas. Toujours est-il que j'ai passé une bonne minute aux toilettes, avant le semi. Il y en a d'ailleurs souvent sur le trajet, bravo les organisateurs !

Depuis le Pulaski bridge, reliant Brooklyn et le Queens, avec mon téléphone portable

Après m'être allégé, j'avais bien la pêche. Je passe le semi en 1h23'19. C'est pendant ma pause que Lance Armstrong a dû repasser devant. Sur le pont vers le Queens, j'ai fait quelques photos avec mon téléphone, l'ambiance était toujours très bonne. On ne reste pas longtemps dans le Queens et le coin est plutôt glauque. Au km 25, on prend un troisième pont vers Manhattan. Là c'est le FRISSON. On est encore sur le Queensboro Bridge quand on entend la clameur de la foule sur Manhattan. Du DELIRE ! En plus, il y avait des affiches assez plaisantes. " If you think '10 Miles to go' means easier " puis " Welcome to easier " et enfin " Welcome to Manhattan ". La foule est tellement dense et agitée que cela devient un bruit continu. Presque comme des acouphènes… qui ne me quitteront plus jusqu'à la fin.

 



 

 

Vidéo de "ptibec" trouvée sur Dailymotion. Merci à lui !

Il rend bien compte de l'ambiance quand on arrive sur Manhattan.

La First avenue est longue, très longue, et la foule parquée derrière des barrières sur 6 km. Photo prise en courant avec mon téléphone :

 

On arrive dans Harlem et l'entrée dans le Bronx se fait par un pont, assez court mais bien bombé. Dans le Bronx, j'ai dû à nouveau faire une pause " toilettes " de plus d'une minute. Mes intestins étaient un peu malmenés. De ce moment, km 34, à l'arrivée, j'en ai vraiment bavé. Je n'ai pas remarqué qu'on était à nouveau sur Manhattan. On descendait le Fifth Avenue. Quand on entre dans Central Park, on sait que c'est bientôt l'arivée, mais il reste pas loin de 4 km et le parc est loin d'être plat, il est même très vallonné par endroit. On ressort du parc pour le longer au sud, " 800 m to go ", " 800 yards to go " (ce qui ne me disait pas grand-chose) puis " 400 m to go "… je me disais " allez, plus qu'un tour de piste ". Je lève mes bras sur la ligne d'arrivée, contrat rempli, 2h57'03 mais qu'est-ce que c'était dur ! On reçoit une couverture de survie en allu, je marche lentement. Je me sens faible. Des gars du " medical care " font un tri visuel entre les coureurs, certains sont dans un piteux état, doivent être portés. " Are you OK ? " me demande l'un deux, je réponds, " yes, I'm fine, just a bit weak ". Pas de tables de fruits, raisins secs etc. mais des sacs individuels (avec des boissons et une pomme). Les camions avec les habits sont impeccablement alignés de 1 à 69. Pas de bol, mes affaires sont dans le camion n°60, au moins 600 m. Comme je me sentais assez faible, j'ai voulu jouer la sécurité, je me suis adressé à un gars des " medical care " qui m'a conduit à la tente médicale. Je me suis assis et j'ai pris deux sachets de sel (NaCl - sel de cuisine) avec un peu d'eau. Après ça allait mieux, et on a fêté ça dignement, le soir, avec nos amis, à Brooklyn. C'est après que j'ai réalisé que j'avais prévu un " thrilling event ", que je ne suis pas prêt d'oublier.

Cuit le Jérôme !

 

 

 
Photos prises au téléphone portable...

(c) Photo Dlapota

 

Au final, 2h57'03, 589ème sur 38439 coureurs classés (1,5%), mais ces chiffres ne rendent pas compte de l'événement !